Interview de Nadia Kabongo d’Allure Etiquette : le savoir-vivre entre le Canada et la France
Fin mars, j’ai ouvert un compte sur Instagram. Un monde s’est ouvert à moi. Je le découvre à peine. (Pour ceux qui pense qu’Instagram est accessible uniquement via smartphone, sachez que c’est faux. Vous pouvez voir les profils et les publications depuis votre ordinateur aussi. Cliquez sur mon lien pour vous en assurez par vous-même).
Après quelques jours seulement, Nadia d’Allure Etiquette m’a recommandée auprès de ses abonnés. Quelle gentillesse ! J’ai découvert que cette belle jeune femme avait également ouvert une entreprise pour enseigner les bonnes manières. Excellent !
Voici son interview !
(Pour ceux d’entre vous qui comptent partir en vacances au Canada cette année, lisez et retenez. Cela vous sera très utile !)
Bonjour Nadia, pouvez-vous vous présenter aux lecteurs d’Apprendre les Bonnes Manières ?
J’ai 31 ans et je suis originaire de Caen en Basse-Normandie. Installée à Toronto (Canada) en 2010 où j’ai vécu 8 ans (et accessoirement fondée une famille), aujourd’hui je suis partagée entre les deux. Même si le Canada est un beau pays, la France me manque et tout particulièrement ma petite Normandie toute pluvieuse. J’ai été investigateur contre la fraude bancaire au Canada pendant quelques années, mais aujourd’hui j’exerce ce métier merveilleux (et polyvalent) de maman. Je me suis donc un peu plus investie dans ma passion: l’étiquette et les bonnes manières. J’ai suivie une formation et suis maintenant une “etiquette expert” certifiée. Cette formation est surtout nord-américaine.
D’où vous vient votre goût pour l’étiquette ?
Outre le fait que mes parents ont toujours été très pointilleux sur notre conduite, notre manière de parler et de considérer les autres nous avions la chance, avec mes frère et sœurs, d’avoir un papa chef cuisinier. Autant vous dire que les repas de famille le dimanche ont été mémorables! La table devait toujours être bien dressée, le couteau à droite, la nappe blanche bien repassée et bien sûr les bonnes manières à table.
Mais j’étais trop jeune pour comprendre que tout ça faisait partie d’un ensemble bien codifié qu’on appelle étiquette! Pour moi tout cela était aussi normal que de respirer puisque je n’ai toujours connu que cela mais le jour où j’ai été négligente en dressant la table, mon père m’a reprise: “non, le couteau doit toujours être placé à droite”!
Je me suis alors demandé “Mais pourquoi…?” J’ai commencé à lire sur le sujet.
Et j’ai découvert d’abord l’art de la table, puis de fil en aiguille, en lisant un peu plus, j’ai appris l’art de l’écriture, l’art de la conversation en bref, le monde merveilleux des bonnes manières.
Vous vivez entre Toronto au Canada et Caen en France, vous avez la chance de partager deux cultures. Quelles sont les détails auxquels il faut être attentif dans ces deux pays ?
Le franc-parler des Français et ce coté froid dont les étrangers parlent si souvent n’est qu’une manière, je pense, de préserver son espace personnel. L’intention n’est pas de blesser, ni de manquer de respect mais au contraire de se montrer “vrai”. Un français, s’il n’a pas envie de parler, il ne vous parle pas et cela convient à tout le monde, entre Français ça ne nous blesse pas.
Le Canadien lui, se sent obligé par courtoisie de vous parler. Je me suis déjà retrouvée dans un ascenseur avec un inconnu qui, je le voyais bien, cherchait n’importe quel sujet de discussion pour éviter ce silence à tout prix. Il faut simplement rentrer dans le jeu et discuter comme si nous nous connaissions et lorsque les portes s’ouvrent, chacun part de son coté. Ce comportement pourrait être perçu comme hypocrite, mais en réalité, ce n’est que de la politesse.
Les Canadiens ont ce coté très galant des Britanniques mais en un peu plus sympathique. Les Britanniques restent bien plus réservés je trouve.
Si on part en voyage touristique au Canada, que faut-il savoir pour ne pas commettre de faux-pas ?
Tout le monde vous dit bonjour et vous demande comment vous allez. Même la caissière au MacDonald’s. Vous dites simplement “bonjour, je vais bien merci et vous ?”. Puis vous passez à la commande. (J’ai beau dire à mon mari qu’on n’a pas besoin, en France, de demander au serveur comment il va, il n’y arrive pas).
Les pourboires sont obligatoires. Oublier de laisser un pourboire est très, très mal perçu.
Et à l’inverse, que conseillez-vous à vos compagnons Canadiens qui souhaitent séjourner en France ?
- S’il vous plait, pas de glaçons dans le vin blanc, c’est un sacrilège. (Je les ai vus faire de mes propres yeux… et pas qu’une fois).
- Ne prenez pas le franc-parler des Français personnellement.
- Ne vous cantonnez pas à Paris. Il est vrai que Paris doit être visité et j’aime énormément cette ville. Mais la France a beaucoup à offrir, notamment des paysages et des expériences culinaires totalement différents en fonction des régions.
Du temps de mes études, j’ai passé une année au Québec, à Sherbrooke. J’en garde un excellent souvenir. Je sais pourtant que les Français n’ont pas la meilleure réputation qui soit. Quels sont les domaines où nous devrions faire davantage d’efforts selon les Canadiens ?
Nous aurions, apparemment tendance à rester entre nous et à clamer haut et fort Ô combien notre pays, notre culture est tellement meilleur.
Nous sommes chauvins et c’est agaçant. Je me suis rendue compte des paroles qui sortaient de ma bouche au début de mon séjour; notre histoire, notre langue, notre façon de nous habiller, notre cuisine,…
Quand on y pense, ce n’est vraiment pas courtois de venir s’installer chez quelqu’un et de lui répéter que chez nous, c’est mieux.
Quelles sont les principales évolutions du savoir-vivre que vous observez à notre époque ?
- J’ai un pincement au cœur en y pensant mais la première et celle des relations parents-enfants et le respect aux ainés en général. Le fait que nous soyons de plus en plus occupés ne devrait pas être une excuse pour ne pas visiter nos grands-parents ou passer du temps avec ses enfants. Il y a de moins en moins ce rituel du dîner en famille, je trouve que ça devrait être sacré, c’est un temps dans la journée où on peut se voir, échanger, se détendre et rire ensemble.
- Le téléphone portable et tout autre écran: je ne suis pas contre la technologie mais ma philosophie c’est que la technologie soit mon esclave et pas l’inverse. Il faut se discipliner et s’efforcer de vivre un maximum notre vie réelle bien plus que notre vie virtuelle.
- Puis vient, surement avec le féminisme, ce rapport homme-femme. J’ai l’impression que le désir des femmes d’être reconnues comme égales aux hommes a été perçu par ces derniers comme une raison de ne plus se comporter en gentlemen. Mais aussi, une raison pour les femmes d’oublier qu’elles peuvent tout à fait être payées le même salaire que les hommes, accéder aux mêmes postes tout en étant de vraies “ladies”. J’espère que tout cela s’ajustera quand la misogynie aura complètement disparue.
En tant que parent, quelles sont les trois règles que vous avez à cœur de transmettre à vos enfants ?
- La notion de “l’autre”. En tant qu’individu, nous ne sommes pas le centre du monde. Nous contribuons au sein d’une famille et par extension, à la société. Nous devons être respectueux, courtois, et serviable envers tout le monde. Que ce soit des gens proches ou des inconnus, quel que soit leur statut social ou leur origine, le respect doit être le même. En bref, “aime ton prochain comme toi-même”.
- Le respect de soi. Pour respecter les autres et être respecter, il faut se respecter soi-même, c’est immuable. Cela passe par une bonne hygiène, savoir bien s’habiller, et se tenir correctement.
- Parler correctement un bon français et un bon anglais. Chercher à enrichir son vocabulaire et se garder de prononcer des mots vulgaires. S’ouvrir à d’autres langues.
Parlons de tenues vestimentaires. La réputation des Français est-elle encore méritée ? Quels sont les points forts et les points de critiques que l’on nous prête à l’étranger ?
Oui! Je trouve remarquable que depuis le Moyen-âge, la mode française soit restée aussi emblématique !
Selon les étrangers, les Français ont le chic pour être élégants même en étant habillé simplement.
Apparemment, nous sommes doués pour faire des assemblages, des tenues qui ont l’air sophistiquées tout en ayant été préparées à la va-vite.
Les Nord-Américains envient ce sens du style qu’ils appellent le “je-ne-sais-quoi” (qu’est-ce qu’ils aiment dire ça!) et écrivent des tas de livres sur “la mode à la française”, “comment s’habiller comme une Française”, etc.
Par contre, si les éloges sur le style restent les mêmes, cette réputation qui date de la Renaissance, comme quoi nous faisons les meilleurs parfums parce que nous ne nous lavons pas est toujours là. J’ai dû expliquer à maintes reprises qu’effectivement, les Français de la Renaissance faisaient des toilettes dites “sèches” parce qu’ils craignaient la peste et utilisaient le parfum pour masquer les mauvaises odeurs mais que nous sommes tous des adeptes de la douche aujourd’hui.
Pensez-vous que l’enseignement des bonnes manières devrait être obligatoire à l’école ou que cela relève de l’enseignement privé et domestique ?
Les deux! Les parents doivent être précurseurs. Les enfants ne font pas ce qu’on leur dit mais ce qu’ils observent, cela doit donc être inculqué à la maison.
A l’école aussi, pour la simple et bonne raison que les enfants passent la moitié de leur vie sur les bancs de l’école et doivent comprendre aussi que les bonnes manières ne sont pas quelque chose de réservée à leur famille uniquement mais que cela concerne tout le monde.
Je regrette vraiment que nous n’ayons plus de cours de bonnes manières dans les écoles, c’est ce qui contribue au déclin des mœurs.
Avez-vous une anecdote à nous raconter où le savoir-vivre vous a sauvé ?
Je n’ai pas d’anecdote spécifique qui me vient en tête, en revanche je suis certaine que la majorité des opportunités professionnelles et dans la vie en général se sont présentées et que des portes se sont ouvertes à cause des bonnes manières.
Pour joindre Nadia Kabongo et profiter des ses services, rendez vous sur le site Allure Etiquette.
Même après tout ce temps au Canada – à Toronto en Ontario – il semble que le mystère demeure sur nos habitudes – oui, je suis Québécoise.
Nous avons évolué dans deux univers :
«Née dans les lis, je grandis dans les roses» Je me souviens (notre devise)
Abandonné par la France, écrasé par le joug de l’Angleterre, nos habitudes sont multiples.Notre culture également.
Nous en avons également assez de cette prétention, de ce regard hautain et de ce mépris face à notre langue que nous luttons à préserver.
Nous sommes tolérant malgré les attaques, courtois et polis (notre héritage britannique). Ou peut-être est-ce le fait de notre évolution parrallèle. De notre habitude à lutter pour présenver notre identité.
On ne parle pas français à Marseille comme au Havre… Onne parle pas français à Québec comme à Montréal ou à Ottawa ou Toronto. Comme onne parle pas anglais à melbourne comme à Londres, à Édinbourg, à Boston ou à Toronto.
Une langue deux cultures.