Académie de Bernadac : le savoir-vivre français enseigné en Chine
Internet permet de sympathiser avec des personnes extraordinaires à l’autre bout du globe. Quelle richesse ! Grâce au blog Apprendre les bonnes manières, j’ai fait la connaissance de Guillaume Rué de Bernadac, le fondateur de l’Académie de Bernadac.
Guillaume enseigne les bonnes manières en Chine. Je vous invite à découvrir son site internet Académie de Bernadac.
Petite suggestion : Rendez-vous dans l’onglet Média pour visionner les reportages sur ses cours. J’attire l’attention des lectrices sur la posture et le maintien. Les exercices (un livre posé sur la tête) restent un excellent entraînement. Faites-le pour vous amuser. Prenez 5 min. Cela va vous sembler très long (je sais). Le fait d’avoir un livre sur la tête nous oblige à ralentir notre rythme et à « laisser la grâce se poser sur nous ». Chose très compliquée pour les femmes over-pressées que nous sommes. …Mais, ô quelle élégance !
Autre plaisir en découvrant le site : la présentation de l’équipe de Guillaume Rué de Bernadac. Tout en bas, dans la présentation de Svetlana Kulnieva, il est précisé : « Mme Kulnieva considère l’étiquette comme pouvant être une puissante aide pour chacun d’entre nous à se réaliser en tant qu’individu. En effet, étudier l’étiquette nécessite de la rigueur, de la patience et de la volonté, qualités indispensables à la réussite de sa vie personnelle et professionnelle. »
J’aime beaucoup le choix pertinent des 3 qualificatifs : la rigueur, la patience et la volonté. Devenir poli s’apprend. Et il ne tient qu’à nous de suivre cet apprentissage. On ne peut pas rejeter la faute sur les parents, les collègues, les voisins, l’enfance difficile, c’est la faute à…
J’estime beaucoup l’insistance sur ces trois qualités. La barre est placée très haut. C’est beau et motivant.
A présent, je vous laisse avec l’interview de Guillaume Rué de Bernadac sur savoir-vivre français enseigné en Chine. Cela va vous plaire !
Le savoir-vivre français enseigné en Chine
– Guillaume de Bernadac, bonjour. Voudriez-vous vous présenter et présenter votre académie ?
Bonjour, Je suis professeur d’étiquette occidentale, et plus spécifiquement française, installé en Chine à Shanghai depuis 4 ans. Nous nous adressons tant aux particuliers (adultes et enfants) qu’aux entreprises. Nos thèmes principaux sont l’art de la table, la démarche (oui, cela vient en second), l’étiquette des affaires, l’éloquence. Désormais nous proposons des formations hôtelières, comme pour les majordomes ou les restaurateurs.
– Comment avez-vous eu l’idée de fonder l’Académie de Bernadac ?
Au cours de mes études j’ai eu la chance de passer un semestre à l’université Tongji de Shanghai, et constater les différences culturelles entre français et chinois. De retour en France, j’ai pu exposer tout cela à ma famille et notamment ma grand-mère, qui est née au Maroc où sa famille, française, enseignait à la cour tant des matières académiques que comportementales : bien se tenir à table, être poli, etc. L’idée d’adapter cela m’est venue et début 2013, j’ai décidé de travailler à temps plein dessus, pour un lancement effectif au printemps 2014.
– Qu’est ce quel est l’élément le plus vendeur de la « french touch » auprès du public chinois ?
Sans hésiter l’image d’élégance. Il y a une vraie aspiration des Chinoises à être élégantes, très féminines, sophistiquées. En cela la France peut être une source d’inspiration.
– Sur mon blog, certains articles cartonnent car ils répondent aux problématiques des Français en 2017. Pourriez-vous nous donner les solutions des Chinois à ces problèmes, comment eux gèrent-ils ces situations ? Premier exemple : comment se débarrasser de ses invités lorsqu’ils s’attardent trop et qu’on a envie d’aller se coucher ?
Tout comme vos lecteurs français, nos lecteurs chinois recherchent des éléments de réponses pour des problématiques de 2017, pas de 1917. Et bien évidemment sur des aspects de leur vie qui leur sont propres. C’est le cas ici: recevoir chez soi n’est pas une pratique très courante en Chine, cela n’est pas un élément aussi important de la vie sociale qu’en France, où c’est une des principales mondanités. En outre, culturellement les chinois ne sont pas très couche-tards, il y a peu de risques qu’ils soient confrontés à ce problème. Ce n’est donc pas une question qu’on nous pose sur les réseaux sociaux.
– Deuxième situation : comment demander une participation financière à ses invités pour une future réception ? En Chine le concept de « donner de la face » à autrui en payant pour tous est très fort. Qui invite, qui est à l’origine de l’événement, se doit de payer pour tous. Et il insistera pour. En revanche, il y a une culture de don d’argent différente qu’en France, où on ne s’offre jamais de liquide, ce qui serait vu comme un manque d’idée, ou au pire de la corruption. En Chine on s’offre volontiers des « enveloppes rouges » pour le nouvel an, les anniversaires, les mariages, qui contiennent plusieurs coupures de liquides. Moi-même j’en offre régulièrement à mes employés, mes gardiens d’immeubles etc. WeChat, le premier réseau social chinois, avec près de 800 millions d’utilisateurs, a même développé une fonction où on peut s’envoyer des « enveloppes rouges ». Un succès colossal! Plusieurs milliards ont ainsi été échangés cette année lors du nouvel an chinois !
– Troisième problème : quelles sont les « bonnes heures » d’arriver pour quelles invitations ?
Ici aussi les pratiques sont différentes. Il est fréquent d’arriver en avance à un rendez-vous, une invitation, une réunion, ou bien un peu en retard, sans que cela soit de l’impolitesse. Je dirai qu’il y a une amplitude de 15min avant et après l’heure donnée qui correspond au moment d’arrivée effectif. Mais la Chine est un grand pays, très vaste, les coutumes varient énormément entre le nord et le sud, les grandes métropoles et les « petites » villes de seulement quelques millions d’habitants.
– Que devrait savoir un Français sur le savoir-vivre chinois lorsqu’il arrive en Chine pour des vacances ou un séjour professionnel ? Quels ont les faux-pas à éviter ? Qu’est ce qu’il est attendu de faire dans le but de donner une impression favorable des Français ?
Se poser ces questions est selon moi déjà un vrai élément de savoir-vivre. Vous l’avez souvent entendu: il faut éviter de faire perdre la face à son interlocuteur, et il faut tacher de ne pas la perdre soi-même. Qu’est-ce que cela veut dire ? En France, on est capable d’exprimer clairement, frontalement, des désaccords, ce qui serait extrêmement malvenu en Chine. On ne contredit jamais, JAMAIS, son interlocuteur. On ne dit jamais non, on va plutôt expliquer pourquoi il est difficile de dire oui. Le chinois ne vous refusera jamais une requête, mais dans un demi-sourire vous expliquera qu’il n’est pas sûr, qu’il a des doutes, ce qui faut interpréter comme un refus. Il est peu aisé pour un néophyte de déceler un « non » chinois, et cela peut être frustrant. J’en viens à un deuxième point: ne pas perdre patience. La Chine en particulier, l’Asie en général, a un goût pour les longues négociations, ce qui peut être interprété pour des discussions de marchands de tapis pour les Français qui perdront patience. Le Chinois y verra un manque de persévérance.
– Quels sont vos projets pour développer encore plus l’aura de la culture française à l’étranger ?
Nous continuons de proposer davantage de formations pour l’hôtellerie, ainsi que la vie quotidienne: celles sur les arrangements floraux ont eu beaucoup de succès ! Et bien sûr d’affirmer fort l’excellence française. Quand je suis arrivé en Chine, l’étiquette occidentale c’était l’Angleterre, et j’ai mis un point d’honneur à affirmer notre savoir-vivre. Aujourd’hui, je vois davantage de mentions de la France, pour mon plus grand plaisir !
Chers lecteurs,
N’est-ce pas une lecture enrichissante et stimulante !? Le savoir-vivre français enseigné en Chine, et les bonnes manières chinoises à appréhender par les touristes et professionnels français… Quelle richesse ! Vous sentez mon enthousiasme !
J’aimerais qu’en France les hommes et les femmes redeviennent aussi élégant qu’à l’époque de Bel ami. Les chinoises s’intéressent à cela et les françaises de moins en moins, c’est dommage.
Lionel de univers-pump.fr
Cher Lionel,
Croyez en l’effet boule de neige. Il suffit que certains retrouvent et appliquent les codes de l’élégance pour que des milliers de personnes les copient.
J’y crois 🙂
Amicalement,